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— Quel air a Québec ? répéta M. de Mirecourt dont l’expression devint grave à cette question. L’air que doit avoir une ville qui a été deux fois assiégée et bombardée : tout n’y est que cendres et ruines. Ses environs où trois sanglantes batailles ont été livrées, le district lui-même qui a été habité pendant deux années par les belligérants, tout porte les traces lugubres des combats et de la ruine de notre pays.

— Y as-tu vu quelques-uns de nos anciens amis ?

— Non, ils ont tous quitté la ville après la capitulation de Montréal et ils tâchent maintenant, comme beaucoup d’autres, d’occuper leur temps et de ré-édifier leurs fortunes renversées, en se consacrant eux-mêmes à leurs fermes et à leurs terres. Il s’écoulera du temps avant que Québec puisse, comme un phénix, renaître de ses cendres.

— As-tu rencontré, en descendant, quelques-unes de tes connaissances ?

— Aucune : je n’avais qu’un seul compagnon de voyage, un Anglais, comme j’en ai jugé de suite d’après son accent, quoiqu’il ait parlé au cocher en excellent français.

— Et de quoi avez-vous causé ensemble ? demanda tout-à-coup madame d’Aulnay, dont la curiosité venait d’être éveillée.

— La conversation aurait été très courte, du moins en ce qui me concerne, — car vous savez, ma belle dame, que je n’ai aucun goût pour ces sortes de rela-