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Assurément, tu ne me refuseras plus la permission d’aller à Valmont ?

— Venez à Valmont si vous le voulez, mais venez-y ouvertement et sans détour : au risque d’encourir la colère et les reproches de mon père, je vous y recevrai avec plaisir ; mais, quant à aller vous rencontrer ailleurs, je ne le puis pas, je n’y consentirai jamais.

— Qu’il en soit ainsi ! Puisque tu l’exiges, je me confierai aux hasards de l’hospitalité de ton père. Mais comment passerai-je le temps durant ton absence ?

— Oh ! quant à cela, vous avez beaucoup de ressources, répondit-elle amèrement. Je n’en veux pour preuve que ce qui s’est passé ici ce soir.

— Comment ! tu es jalouse, Antoinette ?

Et un imperceptible sourire de satisfaction traversa ses traits.

— Je ne croîs pas que j’aie ressenti de la jalousie ; mais ce que je sais, c’est que j’ai été bien malheureuse pendant les quelques heures qui viennent de s’écouler. Je me suis demandé plus d’une fois avec anxiété si l’amour que vous dites avoir pour moi est bien sincère, si cet amour pouvait réellement exister pendant que vous me traitiez ainsi. Oh ! Audley, concevez avec quelle cruelle douleur j’ai pu laisser ce doute pénétrer dans mon cœur, maintenant que nous sommes irrévocablement unis l’un à l’autre.

— Oui, il est bien heureux qu’il en soit ainsi ! répondit-il, les yeux brillants d’un sombre triomphe.