Page:Leprohon - Antoinette de Mirecourt ou Mariage secret et chagrins cachés, 1881.djvu/121

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cependant, Lucille risquait un coup-d’œil furtif et inquiet sur la silencieuse Antoinette dont la figure, de pâle qu’elle était auparavant, s’était recouverte d’un carmin éclatant et fiévreux tel que le froid rigoureux de l’hiver ou les exercices violents auraient pu faite naître.

Lorsque la porte se fût refermée sur le ministre, la nouvelle mariée retira brusquement sa main de celle de Sternfield, et alla se verser un grand verre d’eau qu’elle but d’un trait ; ses doigts mignons tremblaient tellement qu’elle en renversa une partie sur sa robe de noce.

Pensant, tout naturellement, que les nouveaux mariés devaient avoir quelques mots à échanger entr’eux, Lucille avait fait mine de se retirer pour quelques instants, mais un regard inquiet et presque suppliant d’Antoinette la décida à rester. Ne voulant pas augmenter l’agitation qu’elle lisait si clairement sur le visage de sa cousine, elle continua un peu la conversation avec Sternfidd, puis s’approcha de la fenêtre. Pendant ce temps-là, arrêté peut-être par la même crainte, Audley réprimait avec peine les paroles brûlantes qu’il sentait venir sur ses lèvres, et se contentait de quelques mots d’affection tranquille qu’il savait être les seuls que sa craintive jeune femme voudrait recevoir dans ce moment digitation.

— Quelle affreuse nuit ! s’écria tout-à-coup madame d’Aulnay en tirant les rideaux cramoisis qui étaient restés ouverts. Il neige, poudre et tempête de telle