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IX

VOYAGES. — CROQUIS LONDONIENS
(1872-1873)

La mésintelligence avait grandi dans le jeune ménage. À la suite de scènes fréquentes, de plus en plus aiguës, poussé par la crainte d’être dénoncé comme ayant participé à l’insurrection, le poète, facilement alarmé, soumis aux suggestions de plus en plus impérieuses de son aventureux camarade, Arthur Rimbaud, médita, combina, et réalisa un départ.

Il n’était pas question tout d’abord d’une rupture définitive, sanctionnée par une intervention judiciaire. On ne parlait que d’un éloignement temporaire, d’une retraite apaisante. À distance, les époux se calmeraient. Les motifs de querelles n’existeraient plus. On ne se souviendrait plus des méchants propos échangés, au cours de reproches, d’invectives et de hargneuses récriminations. Le temps ramènerait la paix dans la maison, disaient tout haut les beaux-parents, et tout bas ils souhaitaient que le gendre, une fois parti, ne revînt jamais. Il entrait déjà dans leurs calculs que leur fille vécût tranquille auprès d’eux. Ils ne prévoyaient certes pas la solution du divorce, permettant une seconde union, une existence nouvelle, car rien n’annonçait ce grand chan-