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VERLAINE EMPLOYÉ

place, et ne pas m’exposer au reproche immérité d’ingratitude.

Verlaine ne retourna pas à son bureau, quand, après le combat des six jours dans les rues de Paris, la défaite des derniers défenseurs de la Commune, retranchés parmi les tombes du Père-Lachaise, fut achevée. Il aurait pu, sans risques aucuns, se représenter au Luxembourg, où furent installés les services municipaux, l’Hôtel de Ville n’existant plus. Dans la confusion générale, il est probable qu’on n’eût guère fait attention à lui. Au besoin, un certificat, délivré par un médecin ami, lui eût permis de motiver son séjour à Paris, et comme on ne pouvait lui reprocher que son service du bureau de la Presse à l’Hôtel de Ville, il s’en serait tiré avec une admonestation, et, au pis-aller avec une mauvaise note au dossier.

Mais il s’alarma. Il était d’un tempérament nerveux, facilement impressionnable. Il crut se livrer en se présentant à son sous-chef. Il se voyait déjà en Calédonie. Il fut donc démissionnaire de fait. Il disparut de l’administration préfectorale, sans avoir été révoqué par ses chefs, ni inquiété par la police. Au fond du cœur, il n’était peut-être pas très fâché de cette occasion de lâcher l’administration, et de recouvrer sa liberté. Il en avait assez du bural, comme il disait.

Il ne se cacha point. Ce qui prouve que sa terreur politique était exagérée. Il vécut rue Nicolet, chez ses beaux-parents, en famille. Ce fut un désastre. Ses infortunes datent de cette retraite. Les scènes de ménage se multiplièrent, car, n’allant plus à son bureau, Verlaine sortait quand même, et ses stations dans les endroits où l’on boit en devinrent plus fréquentes et plus prolongées. Puis il quitta Paris, avec sa femme, pour aller dans le