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le grand tout, et n’est plus lui-même. N’ayant plus d’existence particulière, il n’a plus aucune propriété. Les anciens empereurs avaient encore quelque propriété. Il faut n’en plus avoir du tout, pour devenir l’ami du ciel et de la terre (union).


F.   Petits mais respectables sont les êtres qui remplissent le monde. Humble mais nécessaire est le peuple. Incertaines mais importantes sont les affaires. Dures mais indispensables sont les lois. Antipathique mais obligatoire est la justice. Sympathique est l’affection non égoïste. Menus sont les rites, mais il faut les faire. Ces aphorismes résument la sagesse vulgaire. — Et moi j’ajoute : Au centre de toutes choses et supérieure à toutes est l’action productrice du Principe suprême. Unique et se transformant en action productrice est le Principe suprême. Transcendant et agissant sans cesse est le Ciel (l’instrument physique de l’action productrice du Principe). Aussi les vrais Sages ont-ils pour règle de laisser faire le Ciel sans l’aider, de laisser agir l’action productrice sans interférer, de laisser le premier Principe libre sans prétendre deviser pour lui. Voilà l’important, à leurs yeux. Pour tout le reste, la pratique commune, ils sont affectueux sans affectation, justes sans prétention, rituels sans scrupulosité, actifs sans façons, légaux sans passion, dévoués au peuple et respectueux des droits de tous. Ils ne considèrent aucun être comme un moyen particulièrement apte, et s’en servent pourtant faute de mieux. L’ignorance de ceux qui ne comprennent rien à l’action du Ciel vient de ce qu’ils n’entendent pas bien celle du Principe suprême, dont le Ciel est l’instrument. Ceux qui n’ont pas la notion de ce Principe lui-même ne sont propres à rien ; il faut les plaindre. — Il y a deux voies, la voie céleste et la voie humaine. Se concentrer noblement dans le non-agir, voilà la voie du Ciel. S’éparpiller et peiner sur les détails, voilà la voie humaine. La voie céleste est supérieure, la voie humaine est inférieure. Les deux voies sont très différentes. Nous allons les scruter attentivement, dans les chapitres suivants.


Chap. 12. Ciel et terre.

A.   Une force transformatrice uniforme, émane de l’immense complexe ciel et terre ; une règle unique régit la foule des êtres ; un seul souverain gouverne la nombreuse humanité. Le pouvoir du souverain dérive de celui du Principe ; sa personne est choisie par le Ciel ; de là vient qu’on l’appelle Mystérieux, comme le Principe. Les souverains de l’antiquité, s’abstenant de toute intervention personnelle, laissaient le Ciel gouverner par eux. Le Principe agissant par le souverain, ses ministres et ses officiers, à ce gouvernement droit juste et éclairé, tous les êtres répondaient par une soumission absolue. Tout en haut de l’univers, le premier Principe influence le ciel et la