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Après avoir quitté Michel, elle se dit : Il est trop timide et trop défiant de lui-même pour deviner jamais que je l’aime aussi. Et maintenant, il veille sur lui de toutes ses forces pour tenir le serment qu’il m’a fait l’autre jour. Comment faire ? Eh bien, lui dire tout simplement : Je sais que vous m’aimez d’amour, et moi aussi… Oh ! mais cela est impossible ! Oui, c’est le plus simple ; mais je ne pourrais pas.

Songeant ensuite à la vivacité passionnée de son jeune amant, elle sourit : Il faudra bien qu’il soit pris en défaut, reprit-elle, et il verra bien alors que je ne me fâche pas. — Elle retourna au jardin le lendemain soir, avant l’arrivée de Michel, et elle s’assit dans un coin, adossée contre le feuillage.

Il vint bientôt après, et, sans la voir, il s’arrêta près d’elle, en regardant par l’ouverture du bosquet dans l’allée. Lucie alors lui prit la main. Il étouffa un cri et faillit tomber à ses genoux ; mais il n’en fit rien et s’assit encore en face d’elle sur l’autre banc. Ils causèrent. De temps en temps, Lucie se disait : Si j’avais du courage… ce serait plus noble et plus franc. Mais elle n’en trouvait pas.

Elle le questionna sur sa vie de tous les jours, pensant qu’il avouerait peut-être un chagrin, dont elle demanderait la confidence. Mais elle n’obtint que des jugements pleins de tact et d’intelligence sur les personnes et les choses qu’il voyait.

Enfin, ils en vinrent à parler de Gène, et elle dit tout à coup :

— Vous ne songez donc point à l’épouser ?

— Non ! répondit-il.

— Pourquoi ?

— Pourquoi ? Ah ! s’écria-t-il avec rage, ça vous ferait plaisir, n’est-ce pas, de me voir marier.