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s’élançant la cognée à la main, il disparut derrière les arbres.

D’un même mouvement, Michel et Cadet s’élancèrent après lui.

— Reste ! cria Michel à son compagnon.

— Tiens ! répondit Cadet en jetant sa cognée ; Michel en fit autant, et ils se reprirent à courir.

Ils n’étaient pas hors du bois qu’un hennissement horrible, éclatant, où la souffrance mêlait quelque chose d’humain, frappa leurs oreilles, suivi presque aussitôt d’une parole éperdue et colère à la fois. Michel, tout à coup, se sentit des muscles de tigre ; il bondit et arriva.

Le cheval, sanglant, se débattait au milieu des harnais brisés ; la voiture versait à ce moment même ; Gavel, étourdi du choc, embarrassé dans les rênes et dans les coussins, faisait pour se dégager des efforts suprêmes, et Jean, la hache levée, — accourait sur lui. Assassin !… grâce !… cria le séducteur de Lisa. Le visage de ce beau Fernand fut horrible à voir… La hache est détournée, et Michel roule à terre, aux prises avec Jean furieux.

Blessé légèrement à l’épaule, M. Gavel appelait au secours. Jean, aveuglé de fureur, tenait toujours son arme, et Michel avait peine à éviter ses coups, lorsque le jeune Mourillon s’empara de la cognée, qu’il lança de toute sa force dans le tronc d’un chêne, où elle pénétra profondément. Alors Michel dit : Sauve-toi, Jean ! sauve-toi ! que personne te puisse voir ici ! Mais ils furent encore obligés de lui tenir les bras pour l’empêcher de frapper. Enfin, il regarda tout autour de lui, se prit à trembler de tous ses membres, voulut s’enfuir, et tomba, presque évanoui, sur la lisière du bois.

— Monsieur ! s’écria l’ingénieur en s’adressant à Michel, vous m’avez sauvé la vie !