Page:Leo - Un mariage scandaleux.djvu/199

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vit entrer Mourillon qui se mit à chercher des yeux dans la salle. Il avait la figure très-animée, l’air inquiet, et son état d’ébriété paraissait exalter ses facultés au lieu de les abattre.

Apercevant Marie, il se dirigea vers elle, et ils échangèrent quelques mots ; puis Mourillon quitta la salle. Marie le suivit des yeux avec un air d’inquiétude, cependant elle se remit à danser ; mais évidemment elle était préoccupée. Après la contredanse, elle s’approcha de son frère, assis auprès de Gène, et parut lui adresser une demande qu’il refusa de belle humeur, mais péremptoirement. Déconcertée, Marie d’un pas lent retournait vers sa place, quand tout à coup, changeant de direction, elle alla vers Michel.

Celui-ci venait d’apprendre par Mlle Bertin ce qui s’était dit sous la fenêtre. Aussi, quand Marie lui eut demandé comme un service de la reconduire à la ferme des Èves, il accepta tout de suite, et après avoir échangé avec Lucie un regard d’intelligence, il suivit hors de la salle la jeune Mourillon.

— Je te porte ennui, mon bon Michel, dit Marie quand ils furent dehors ; mais vois-tu, jamais n’aurais osé, un soir de ballade, m’en revenir toute seule à la nuitée. Les chemins à cette heure sont pleins d’ivrognes qui regagnent leur logis.

— Tu as bien fait, dit Michel. Mais pourquoi donc quittes-tu le bal avant les autres ?

— Je peux te conter ça, reprit-elle, car tu sais comment sont les hommes, quoique tu sois plus sage, toi. M’a semblé que mon père avait du vin, et quand c’est ainsi, je me soucie pas que ma mère soit seule à la maison.

— A-t-elle pas Lisa ? observa Michel.

— Oh ! Lisa !… fit Marie avec un soupir. Elle dort !…

— Jean aussi est resté aux Èves ; il n’a pas voulu danser. Que diable a-t-il donc, ce Jean ? Il est si triste !