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— Folle ! folle ! tais-toi ! puisque tu sais bien que je ne peux pas t’épouser, que veux-tu donc ?

— Je ne sais pas, mon Fernand, je ne sais pas ; j’ai grand mal de tête, et peut-être que je vas mourir.

En même temps, elle chancela et tomba par terre évanouie.

Fernand courut à la rivière, trempa son mouchoir et fit couler de l’eau sur le visage de la jeune fille. Il avait pourtant des larmes dans les yeux, et murmurait : Pauvre créature ! Jean, accouru, soutenait la tête de Lisa.

— Sauvez-vous, dit-il à Gavel avec un regard féroce, car l’envie me prend de vous étrangler.

Lisa rouvrait les yeux.

— Je ne me sauve pas, dit Gavel, je m’en vais parce qu’il le faut ; mais si tu fais le bavard ou l’insolent, gare à toi !

Alors il prit une pièce d’or et l’offrit à Jean, qui la lui jeta au visage. Gavel faillit sauter à la gorge du jeune paysan, mais, fidèle aux lois de la prudence, il se contint par un violent effort.

— Prends garde ! répéta-t-il avec un geste de menace et une expression terrible ; puis il s’éloigna rapidement. Déjà habile à lutter avec les émotions humaines en lui-même et hors de lui, les cinq minutes qui le séparaient de Mmes Bourdon lui suffirent pour calmer ses nerfs, attiédir son sang et rasséréner son visage.

— Vraiment, mesdames, dit-il avec un sourire, en les abordant, on vous redoute beaucoup. Moins timide avec moi qu’avec vous, sans doute à cause de ma qualité d’ancien commensal de la ferme des Èves, Mlle Lisa Mourillon vient de m’imposer le rôle d’ambassadeur pour excuser la grossièreté de son domestique.

Mme Bourdon était trop amie des convenances pour ne pas accepter sans observation, devant sa nièce et sa fille,