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Mais Madeluche nous regarda de travers pour ce bon conseil, et n’en serra que plus étroitement le marmot dans ses bras.

— Où donc est la mère de ces enfants ? demandai-je.

— Elle travaille aux champs, dit M. Plichon.

— Quoi, les femmes travaillent comme les hommes, au dehors ?

— À peu près, excepté le labourage.

— Et les enfants, qui les soigne ?

— Il n’y a que les premiers qui retiennent un peu la mère à la maison ; les derniers sont élevés par les aînés. Tenez, ces deux plus petits, leur véritable mère est la Madeluche ; l’autre n’est que leur nourrice.

En retournant la tête vers le groupe des enfants, dont nous nous étions éloignés de quelques pas, je vis Madeluche embrasser son marmot avec cette passion maternelle dont nous avons tous le souvenir.

Je demandai à M. Plichon comment on pouvait vivre et élever des enfants au milieu des miasmes de ce fumier.

— Eh ! s’écria-t-il, faites donc entendre cela aux paysans. Leur fumier, c’est leur trésor, et ils consentiraient plutôt à le mettre dans leur maison qu’à l’éloigner de leur porte.

Il partit de là pour déblatérer contre la sottise et l’entêtement des gens de la campagne. C’est bon ; mais je crois qu’il n’en souffre guère. Si j’étais le maître de cette ferme, elle serait plus saine.

Je te disais tout à l’heure que je changerais volontiers l’ameublement de ma chambre ; mais pour rien je ne donnerais la vue que j’ai de ma fenêtre, sur le grand