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je suis précisément pour elle ce qu’elle est pour moi.

C’est que toute la raison de l’influence de l’être, vois-tu, est dans sa force et dans sa liberté. Pouvons-nous désirer ce que nous possédons ? Non, et le triste secret de tant d’abandons et de satiétés est là. L’être qui s’appartient à lui-même, au contraire, est toujours notre arbitre pour ce que nous voulons de lui. Il porte en lui tout l’inconnu de ses résolutions futures, tout ce que l’indéterminé contient d’infini.

Puis, nous travaillons ensemble au même but. Aux joies de l’amour s’ajoutent les plaisirs de la recherche, l’activité de la lutte, et l’ardeur des espérances. N’est-ce pas le véritable bonheur humain que cet épanouissement de toutes les facultés dans une même harmonie ? C’est la vive saveur de l’inconnu, mêlée à l’ineffable douceur des attachements sacrés ; c’est la sécurité dans l’agitation, le progrès dans la durée, la vie enfin, conforme aux lois naturelles.

Non, l’amour même ne peut contenir l’esprit, infatigable chercheur, conquérant insatiable. Mais quand deux êtres sont unis à la fois par un grand amour et par de communes croyances, leur mariage, vois-tu, c’est le roc solide, inexpugnable, éternel, contre lequel se brise tout effort de l’Océan, du temps ou des hommes, et sur lequel fleurissent les plus douces choses que puisse créer le mélange des forces de la terre et de la rosée du ciel.


FIN.