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jamais cru cela de Blanche. Encore une déception. Il n’y a donc point au monde, grand Dieu ! d’affection vraie ! Ah ! vous devez bien souffrir !

En même temps, elle s’empressait autour de moi, voulait me faire respirer des sels, m’offrait sa médiation, et j’eus bien de la peine à lui faire comprendre que je n’étais ni malade ni désolé, ce qui la déconcerta encore plus que tout le reste. Cette pauvre Clotilde, elle, ne comprend plus rien à la vie depuis quelque temps ; car elle n’ose plus même donner de larmes à Forgeot, qui, tu le sais, figure en première ligne dans tous les journaux, parmi les bandits organisateurs de l’affaire des mines.

J’obtins donc de Clotilde qu’elle cessât ses consolations, et je sortis du salon sous prétexte de prendre l’air.

Certes, j’étais libre, et, quelle que fût la contrariété de M. Plichon, rien ne pouvait m’obliger, après les paroles de Blanche, à renouer cette union. Je montai l’escalier ; je cessais enfin de me contenir, et l’ivresse du bonheur me montait à la tête. J’allai frapper à la porte d’Édith ; elle vint ouvrir, et, en me voyant, devint toute saisie :

Qu’y a-t-il, mon Dieu, William ?

À peine eut-elle refermé la porte. — Il y avait un nuage autour de moi ; je la voyais à peine. — Je lui dis :

— Votre sœur vient de rompre avec moi !

Édith comprit aussitôt ; car, sans me répondre, elle se laissa tomber sur une chaise.

— C’est Blanche elle-même qui a rompu ? me demanda-t-elle enfin d’une voix altérée.

— Je vous le jure, Édith, je suis libre, je suis libre !

Et je m’agenouillai devant elle, baisant sa robe,