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tie. Il a publié quelques brochures où il encense tour à tour le peuple, le trône et l’autel, et propose à grand fracas des réformes illusoires ou impossibles.

Cet homme a la nature qui me répugne le plus : esprit faux autant que souple, conscience, nulle, cœur mort, si jamais il a vécu. Cette définition si incomplète, l’homme est une intelligence servie par des organes, le peint complètement si on la retourne. Toutes les ressources de son esprit sont, en effet, appliquées au service de son bien-être, et il ne conçoit pas à la vie un autre but. Sa politique est athée comme sa morale. Il veut la liberté ; mais ne la comprenant, comme toute autre chose, qu’au point de vue individuel, il en fait une licence égoïste, antisociale. L’honneur, l’amour de la patrie, pris dans leur sens le plus juste et le plus élevé, ne sont pour lui que des enfantillages ; car il ne reconnaît que des intérêts. Il condamne les efforts d’un peuple qui réclame sa liberté, si la domination à laquelle ce peuple veut se soustraire est douce, et il ne trouve rien que d’enviable dans le sort de l’esclave bien nourri et bien traité. Ce qu’il y a de très-large chez lui, c’est la tolérance ; la raison en est simple : il ne répugne à rien.

Toutes ces tendances s’accordent avec le goût excessif de son esprit pour le paradoxe, et, comme il cherche à paraître facile et sans préjugés, en même temps qu’il aime à vous étonner de ses jongleries, il n’est sorte d’accommodement qu’il n’essaye et ne façonne, en prenant le biais de tout. C’est, je le répète, l’être le plus antipathique à ma nature ; sa négation de tout ce que j’adore et respecte me fait mal, et je n’ai jamais senti plus vive-