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intention est de donner des leçons sérieuses, et je serais désolé qu’on les acceptât autrement.

Blanche se mit à sourire. J’insistai de nouveau pour leur faire comprendre que la chose me tenait à cœur, et je sens en effet le besoin d’ouvrir de nouveaux espaces à l’imagination de cette chère enfant, dont le défaut d’instruction me peine. Elle a passé quatre ans au Sacré Cœur (ce qui, pour le remarquer en passant, est bien le fait d’un père voltairien), et depuis deux ans qu’elle en est sortie, je ne crois pas qu’elle ait ouvert d’autres livres que son journal de modes et son paroissien. Mais cela précisément fait le bonheur de son père, et il me déroula tout le bonhomme Chrysale, en y joignant des considérations érotiques, dont, en présence de sa fille, il eut dû s’abstenir.

— Rien n’est laid comme une femme pédante, s’écria-t-il.

— Parce qu’apparemment, par manque d’habitude, leur pédanterie vous choque plus que celle des hommes, répliquai-je ; mais la science en elle-même ne comporte point cet inconvénient. Bien donnée et bien reçue, elle n’inspire que simplicité, raison, douceur. Je vous dirai à mon tour : rien n’est aimable comme une femme instruite. Un esprit ignorant, si intelligent soit-il, est forcément réduit au silence sur une foule de sujets, outre qu’il est privé des larges aperceptions, des conceptions lumineuses et soudaines que la connaissance, mise en rapport avec les faits, peut fournir à la pensée.

Et je me disais, à part moi, qu’un bourgeois ignorant, ou simplement lesté de la science du collége, veuille