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un moment chez les Favrart. Le plus souvent, c’était Léontine qui, bien plus en peine de ses heures, accourait dès la fin de la classe et s’installait pour babiller au foyer de l’institutrice, ou se faisait accompagner par elle dans le village. Elles allaient ainsi, tantôt chez l’épicière, tantôt chez la repasseuse, ou chez le messager de Beauvais, qui demeurait tout à l’entrée de Boisvalliers. Chemin faisant, on rencontrait toujours quelqu’un avec qui échanger un mot, et toujours, pour échanger au moins un salut, le jeune Moreau, devant la maison duquel il fallait passer, et qui se trouvait généralement à cette heure-là occupé à fumer un cigare dans la rue devant sa porte. Quelquefois elles le rencontrèrent aussi chez les marchands ; on revenait alors en causant familièrement ; le cigare était de la partie ; mais Mlle Favrart supportait assez patiemment les inconvenances du jeune homme.

— Pardonnons-lui, car il ne sait ce qu’il fait, disait-elle parfois avec un léger haussement d’épaules, à son amie.

D’autres fois, cependant, plus impatientée, elle s’écriait :

— Moi, je n’ai connu jusqu’ici que des officiers, c’est-à-dire les hommes le plus galamment polis vis-à-vis des femmes ! Avoir maintenant affaire à de pareils rustres !

Et elle embrassait Sidonie, en lui disant :

— Suis je heureuse au moins de vous avoir ici pour compagne, au lieu d’une petite grisette mal décrassée, sur laquelle je devais compter !

Il était évident toutefois que la société de Sidonie ne suffisait pas à Léontine ; car