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— Et si j’avais été Berthe Josselin, que me diriez-vous ? demanda-t-elle.

— Hélas ! vous auriez plus de peine à me reconnaître. Je suis Sidonie Jacquillat.

— Sidonie Jacquillat ! Est-il possible ? Vous, Sidonie !

L’étonnement de Mme de Néris, en considérant la pauvre femme qui se nommait à elle, était vif et pénible. Elle reprit vite cependant sa présence d’esprit. Mlle Jacquillat allait parler, s’expliquer ; elle lui ferma la bouche d’un air d’autorité douce, en posant la main sur sa main, et se tournant vers le jeune homme :

— Monsieur Raoul, décidément, il faut que vous soyiez assez bon pour vous rendre seul au château, et m’envoyer la calèche.

Le jeune homme acquiesça à cet ordre par un salut un peu ironique, et s’éloigna aussitôt.

— Vous, Sidonie ! reprit alors Mme de Néris. Vous, mon ancienne amie de pension, cette jolie Sidonie que j’aimais tant.

— Oh ! oui ! je ne suis plus même la pâle image de celle que j’étais. J’ai tant souffert ! On peut donc rester aussi belle et aussi jeune que vous l’êtes encore, vous ? Quelle différence entre nous, grands dieux !

Les yeux de Mme de Néris se mouillèrent de larmes.

— Je vous reconnais maintenant un peu, dit-elle. Vous semblez, en effet, plus âgée que vous ne l’êtes réellement ; car nous avions alors seize ans l’une et l’autre. Écou-