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arrivée, par la sincérité du sentiment, au dernier mot, — encore à peine formulé — de la science éducatrice, le droit moderne appliqué à l’enfant aussi bien qu’à l’homme : la grande et sainte liberté naturelle, dont l’exercice réfléchi et non-seulement la force, mais le devoir, puisqu’elle nous apprend par le nôtre le droit d’autrui.

Mais tout cela ne fut qu’instinctif au premier abord ; sentiment, et non connaissance. Contraindre sa chère enfant, ressembler pour elle aux tyrans qui l’avaient frappée, rudoyée, Sidonie ne pouvait s’y résoudre. Il fallait donc bien que Rachel comprît son devoir, qu’elle voulût elle-même. Mais quoi ? pour bien expliquer, il faut bien savoir, être certain soi-même… Pauvre Sidonie ! Après des semaines, des mois de difficultés, de doutes, d’angoisses, elle s’aperçut enfin que la vérité, la loi morale ne lui avaient pas été données, qu’elle ne les possédait pas et ne pouvait par conséquent les donner à sa Rachel.

Que disaient l’Église et l’État, le moniteur et le catéchisme, le curé et le recteur ? — Sacrifie à Dieu, obéissance aux puissants.

— Pourquoi ?

Pourquoi ? c’est ce que Rachel aussi, dans son naïf langage demandait, quand ces hautes prescriptions, se faisant petites, descendaient jusqu’à sa taille. Elle ne savait rien, cette Rachel, et déjà, pourtant, elle disait avec une conviction si puissante : — Je ne veux pas !

(À suivre)

ANDRE LÉO