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l’ours des Saulées, tout marquis soit-il. Cependant je te conseille d’y renoncer. Le beau-père ne me va pas.

— Bah parce qu’il est un peu flâneur, un peu hâbleur, un peu… pas grand’chose ? Mais, ma chère, cela vient d’une distinction native. Cet homme-là s’est trouvé trop intelligent pour vouloir s’abrutir comme les autres par le lourd travail de la terre, et comme il n’avait pas d’autre carrière… il n’est heureux que lorsqu’il fréquente les bourgeois ; c’est l’amour de l’idéal qui le perd. »

Tandis que Cécile riait de cette explication indulgente, Lucien ajouta :

« Et nos parents, qu’en dis-tu ?

— Ils me paraissent excellents. Seulement, si la tante Darbault continue à prendre tant de peine pour nous, il faudra nous hâter de chercher un autre gîte.

— Que veux-tu ? c’est sa manière. Elle ne le fait pas exprès. C’est à nous de tâcher de lui faire comprendre que plus de simplicité nous irait mieux. Et les deux cousines ?

— Elles ne m’ont jusqu’à présent parlé que de chiffons.

— Lilia est instruite, à ce qu’on prétend. Mais je crains qu’elle n’abuse de ses connaissances littéraires, car voici ce qu’elle m’a dit quand j’étais auprès d’elle, à table : « Ah ! mon cousin, vous êtes heureux, vous, de pouvoir planer à votre aise dans les régions éthérées de l’art ! » Cette phrase est flatteuse pour moi, certes, mais je ne l’en trouve pas moins prétentieuse. Elle a aussi de mélancoliques regards,