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liches pour acheter un homme à ce diable de garçon… » Louis de Pontvigail a donc trente-cinq ans, ni plus, ni moins.

— Je l’avais pris pour un homme plus âgé, dit Cécile.

— Cela tient au peu de soin, je me trompe, au trop de soin qu’il a de lui-même. Il se croit toutes les maladies, se tient voûté, porte un bonnet de soie noire, comme vous avez vu. C’est le malade imaginaire.

— Pas précisément, dit le docteur. M. Louis éprouve bien réellement les souffrances qu’il accuse, tantôt à la poitrine, tantôt au cœur ou à la tête. C’est l’effet d’une irritation nerveuse des plus intenses qui, se portant alternativement sur tel ou tel point, affecte tour à tour les symptômes de telle ou telle maladie. Au reste, il ne doit qu’à sa constitution de fer d’être exempt jusqu’ici de lésions sérieuses ; mais si le vieux Pontvigail vit quinze ans encore, je suis persuadé qu’il enterrera son fils.

— Vous croyez ?

— C’est indubitable. Cet état d’exaspération, de tension continuelle, ne peut durer longtemps sans user les ressorts et causer quelque grave atteinte. Je crains même qu’il n’existe un commencement d’hypertrophie du cœur.

— Est-il possible ? dit Cécile, qui, placée près de M. Delfons, l’avait écouté attentivement. Mais c’est affreux cela ! Un père dont l’existence détruit celle de son fils ! Quelle sorte de monstre est donc ce M. de Pontvigail ?