Page:Leo - L Ideal au village.pdf/27

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— C’est tout ? demanda Cécile, avec un peu d’embarras, à Lucien qui se taisait.

— Pas tout à fait. À quelques jours de là, il y eut échange de baisers et de serments. Elle doutait bien un peu, la chère petite, et me disait : « Vous m’oublierez à Paris. »

— En effet, c’est mal, Lucien.

— Ah ! je t’assure qu’en partant j’avais bien l’intention de lui rester fidèle et de revenir selon ma promesse. Mais ce fut impossible. Ce pauvre amour si naïf s’était laissé voir, et M. Darbault en écrivit à mon père. L’année suivante, je demandai vainement à retourner à Loubans, et, quand je laissai voir mon chagrin, mon cher père me parla tendrement, me priant d’attendre, de mûrir mon caractère et mon jugement avant de prendre un parti si grave que celui de m’engager à une paysanne.

— C’était une paysanne ! s’écria Cécile.

— Oui… c’est-à-dire qu’elle en porte à peu près le vêtement. Cependant, jamais créature plus belle et plus distinguée par la nature… Si tu avais vu près d’elles nos cousines, quelle différence ! »

Mais Cécile paraissait un peu déconcertée. Lucien se leva :

« Je ne sais guère ce que maintenant elle peut être devenue, dit-il d’un ton dégagé. Mariée, sans doute, car elle doit avoir plus de vingt ans. Je la reverrais avec intérêt, voilà tout. Pauvre Rose !

— Elle se nomme Rose ?

— Oui, Rose Deschamps. Tu la verras probablement là-bas. Elle a dû conserver ses relations avec la famille, car elle était amie d’enfance de notre