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Sur ce mot, elle s’approcha, et feignant d’arranger la cravate de son frère :

« Tu avais quelque chose à dire à M. de Pontvigail, » murmura-t-elle.

Il répondit de même :

« Oui, mais je le lui dirai fort bien devant toi. »

Cécile s’enveloppa d’un châle, et ils sortirent.

Ainsi que l’avait dit Lucien, c’était une belle nuit. La lune, à son dernier quartier, répandait une lueur pâle, et toutes les étoiles jetaient leurs feux. Un souffle d’automne, parcourant les arbres, froissait les feuilles avec un bruit sec et les cris stridents des chats-huants, sortis de leurs retraites, se répandaient de la plaine au bois.

Le sentier des futaies étant à cette heure couvert d’ombre, on prit dans le taillis un chemin plus praticable, qui servait à l’exploitation et descendait le coteau par de longs détours. Cependant, les ornières qui le traçaient, recouvertes d’herbe ou masquées par des touffes de rejets de chêne, échappaient souvent à la vue, et, malgré les indications de Louis, qui marchait en avant et semblait connaître le chemin à merveille, Lucien et sa sœur rencontraient nombre d’achoppements. Mal dirigée par son frère, auquel elle donnait le bras, Cécile mit le pied dans une ornière et faillit tomber.

« Je veux conduire les autres et ne sais pas me conduire moi-même, dit Lucien ; monsieur de Pontvigail, voulez-vous donner le bras à ma sœur ? Moi, j’étudierai le chemin pour le retour. »

Louis obéit sans répondre ; cependant Cécile eut si bien conscience du bonheur qu’il éprouvait d’être