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tant d’amoureux, sa réputation est sans tache. Quelle idylle je m’étais faite ! Et voici que l’argent encore et toutes ses vanités infernales viennent jusqu’ici me la disputer ! Où pourra-t-on se marier désormais ? Je ne le sais plus.

— Mauvaise tête ! dit la jeune fille en passant la main dans les cheveux de son frère, qui venait de se jeter près d’elle sur le canapé, mauvaise tête ! Il faut toujours que tu t’emportes pour ou contre quelque chose, et tu n’es jamais de sang-froid sur rien. Moi, je trouve qu’un seul parti serait prudent ; mais il te semblera difficile : c’est d’attendre un peu.

— Tu sais bien que je ne puis pas, dit-il en se levant de nouveau. Attendre ! quand toute ma vie est en jeu ! plus que ma vie ; car enfin il faut croire à quelque chose. Elle m’a dit qu’elle m’aimait cependant, et… je l’ai bien vu. Oui, elle m’aime ; seulement, si elle était faible à ce point…

— C’est demain qu’elle vient ici en journée, dit Cécile d’un air sérieux. Veux-tu que je lui parle moi-même ?

— Oui, s’écria-t-il, c’est cela ! Tu es une sœur adorable. Oui, tes conseils, ton appui, lui donneront du courage. Vous seriez si charmantes de vous aimer toutes les deux ! Tu verras : ce sera une bonne et délicieuse petite femme que Rose. Elle a besoin seulement de sortir un peu de son milieu, et toi qui es habile comme une fée, tu me feras des miracles, j’en suis sûr ! »

Il saisit sa sœur dans ses bras et lui donna vingt baisers ; puis il se calma, reprit confiance, et monta