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Elle était là dans tous les détails de sa grâce et de sa beauté, émue comme lorsqu’elle l’avait rappelé à l’indulgence ; il voyait encore le doux gonflement de son fichu de mousseline, et croyait sentir le parfum de cette rose qu’elle avait à sa ceinture, et qui semblait ajouter plus de grâce encore aux lignes pures de son corsage. Il entendait de nouveau les paroles qu’elle lui avait dites. Elle seule avait compris tout ce qu’il avait souffert ; elle avait bien voulu lui donner des conseils ; elle semblait désirer qu’il fût heureux. Lui heureux ! Comment ? Pouvait-il jamais l’être ? Lui heureux !

Elle croyait, elle aimait ; elle chantait des choses divines. Sa voix était passionnée comme une âme qui a souffert, et cependant elle avait dans les yeux et sur les lèvres l’ignorance du mal. Jamais il n’avait vu sa pareille en ce monde. D’où venait-elle ? À quelle source immense puisait-elle toutes ces harmonies qui ruisselaient de ses doigts, de ses lèvres, de tout son être ? À chaque fois qu’il l’avait vue, de plus en plus elle l’avait ravi.

La première, elle avait charmé ses yeux ; la seconde, sous la cabane au bord de l’Ysette, par de vives paroles d’estime et de sympathie, elle l’avait comme relevé de sa solitude et de son abaissement vis-à-vis de tous. Pendant ces soirées, où il l’écoutait de loin, elle l’avait enivré des poésies les plus pures et les plus tendres ; ils avaient ensemble goûté les mêmes émotions.

Et maintenant qu’il l’avait vue de tout près, marcher, sourire, comme une autre femme, et qu’elle avait causé avec lui, il se sentait sous l’em-