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« J’ai souvent passé, dit-il, des heures entières, couché sur une colline, à écouter ces chants ; ils me causaient une grande émotion. Dans ce temps-là, je ne vous avais pas entendue, ajouta-t-il.

— Même après des compositions plus savantes, ils sont toujours beaux.

— Oui ; mais vous, c’est bien plus profond ; vous savez ce que vous dites, eux ne le savent pas. »

Cécile, émerveillée de cette réponse du sauvage, regarda son frère, qui sourit.

« Monsieur de Pontvigail, vous reviendrez nous voir, n’est-ce pas ? » dit-il.

Louis hésita.

« Ce serait pour moi seul, murmura-t-il.

— Non, monsieur, dit Cécile ; un homme de cœur, et qui sent vivement les grandes choses, n’est point un visiteur ordinaire, ici ni ailleurs. »

Le visage de Louis de Pontvigail s’empourpra ; il ne répondit pas. Des arpèges nonchalants, touchés d’une seule main par Cécile, remplirent seuls le silence pendant un moment.

« Savez-vous la Marseillaise ? demanda Louis tout à coup, avec une sorte de résolution.

— Assurément ! » répondit la jeune fille d’un petit air héroïque, et, se replaçant au piano pour s’accompagner, elle entonna d’une voix peu mâle, mais vibrante, le chant national. Déjà, au refrain, Louis de Pontvigail avait bondi de son siège et marchait dans la chambre avec agitation.

« Eh bien ! après ? demanda-t-il d’une voix passionnée, quand elle se tut.

— C’est que je ne sais pas les autres couplets.