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« Le ciel est très-beau ce soir.

— Et voyez, mademoiselle, comme ces constellations (elle appuya sur ce mot) y font bon effet. Ah ! ça remue, ça élève le cœur, surtout quand on pense que tout ça sont des mondes comme nous. Ça ne confond-il pas l’imagination ! »

Cécile cherchait avec effort une réponse à ces prétentieuses banalités, quand, voyant s’agiter d’une façon insolite les rameaux d’un laurier-cerise, elle demanda à Mme Arsène si les maraudeurs n’étaient point à craindre aux environs.

« Justement, mademoiselle, il m’a semblé voir un homme dans le jardin, hier soir, à cette heure, pendant que mademoiselle faisait de la musique. Mais il ne paraît point qu’on ait touché aux fruits. Si je connaissais par ici des jeunes gens assez romantiques, je croirais plutôt qu’on vient écouter mademoiselle. Car il y a de quoi tomber dans le ravissement. Ah ! je ne puis m’empêcher de croire que j’étais née pour une existence différente ; car tout ce qui est beau me transporte, et quand mademoiselle se met à son piano, rien que d’entendre les premiers accords, je me sens toute bouleversée.

— Je vais vous donner ce plaisir, « dit Cécile en rompant ainsi l’entretien. »

Et elle rentra, suivie de Mme Arsène, qui n’osait pas rester seule, et qui saisissait tous les prétextes pour s’installer au salon.

Quand elle fut à son piano, Cécile retomba sous l’empire des pensées douces et mélancoliques dans lesquelles, au jardin, elle s’était plongée. Au milieu du crépuscule, et de souvenir, elle joua lente-