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— Ah ! ah ! comme ça, ce n’est donc pas des gens regardants ?

— Peuh ! pour qui les prenez-vous ? Allez ! allez ! vous n’aurez pas besoin à présent de porter votre volaille au marché. Seulement, nourrissez-la bien, car ce n’est pas du rebut qu’il nous faut. On n’y regardera pas ; mais il faut que ce soit beau. »

Cécile ne fut pas longtemps sans s’apercevoir que les insinuations indiscrètes de Mme Arsène portaient leurs fruits. Ils eurent à entrer en négociation avec le fermier pour la cession de la partie du jardin qui touchait à la maison et dont Cécile désirait faire un parterre ; ce n’était qu’une location, et cependant le fermier ne demanda pas une somme inférieure à celle qui représentait, au taux du pays, le prix même du fonds de terre. Lucien s’emporta ; le fermier se trouva fort désappointé, et grommela en acceptant le triple de la valeur de son carré de jardin.

On prenait à la ferme le lait, le beurre, les œufs, les volailles ; et le tout se payait aux prix de Paris, avec cette seule différence que la qualité était inférieure et le choix impossible. Au risque de se faire des ennemis à la ferme, Cécile se serait fournie ailleurs ; mais Mme Arsène était une bonne trop distinguée pour consentir à porter le moindre fardeau et pour s’en aller, le panier au bras, à Loubans, ou dans les fermes voisines.

Elle faisait seulement les emplettes d’épicerie, et ce n’était pas sans se plaindre, ni sans de grands embarras, prenant partout le meilleur et le plus cher, en sorte que Cécile fut obligée de lui déclarer qu’elle entendait se contenter à moins, d’autant plus