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Quelques pas plus loin, poussant une barrière à demi fermée, ils pénétrèrent dans une prairie au fond de laquelle on apercevait la maison, basse, mélancolique, et masquée à demi par un large saule pleureur. Vue de ce point resserré entre les coteaux, au milieu de cette prairie bordée de grands peupliers et entrecoupée de saules et d’oseraies, cette maison semblait une tombe, et Cécile, en la voyant, se prit à penser aux longs ennuis que ce lieu devait nourrir dans l’âme de Louis de Pontvigail. À mesure qu’ils approchaient, cependant, les coteaux s’écartaient et s’abaissaient, et de l’autre côté de la ferme on apercevait des champs et des prés.

Lucien et sa sœur étaient arrivés près du bassin d’eau verte et dormante qu’ombrageait le saule, quand un dogue s’élança tout à coup sur eux avec une telle furie que Lucien, dépourvu de toute arme défensive, et craignant pour sa sœur, appela de la ferme à voix haute. On vit alors paraître sur le seuil une grande femme à l’air bourru, aux cheveux mal peignés, dont la coiffe, posée de travers, surmontait un front ridé, et qui, avant de rappeler le chien, considéra froidement les deux étrangers.

« Fidèle ! » cria-t-elle enfin, et le chien retourna dans sa niche en rampant.

« Que voulez-vous ? demanda-t-elle ensuite d’un ton maussade.

— Nous désirons parler à M. de Pontvigail, » dit Lucien.

De nouveau elle les regarda, et sans répondre un mot rentra dans la maison. Les deux jeunes gens attendirent un moment, puis, voyant que nul ne ve-