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FEUILLETON
DU PHARE DE LA LOIRE DU 29 MARS.
======= N° 3 ======
ATTENDRE-ESPÉRER

I
(Suite).

Ce fut probablement cette réflexion absurde qui décida le docteur à se lever et à renouveler à Jeanne l’injection du silence, en ajoutant qu’il reviendrait le lendemain.

Il prit à travers la plaine, dans la direction d’un village dont on apercevait de loin les toits entourés d’arbres.

Le pas du jeune homme était vif, ardent, et son visage animé révélait une grande activité intérieure. On y voyait passer des expressions diverses ; plus d’une fois il sourit ; des gestes lui échappèrent, et on l’eût dit engagé dans une conversation émouvante, bien qu’il n’eût à ses côtés aucun interlocuteur.

À mi-chemin, cependant, il s’arrêta court et comme étonné lui-même de la rapidité de sa marche ; il passa la main sur son front et respira largement. En vérité, rien ne le pressait d’arriver là-bas. Non, c’était plutôt quelque chose qui le poussait ; et ce qui l’oppressait n’était pas tant la rapidité de sa marche qu’une agitation tumultueuse d’impressions, de désirs, de sentiments, qui se pressaient en lui, instinctifs et confus, mais grondeurs, ardents, emportés, comme une populace qui vient