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lumière, qui semblaient ramper, se retiraient lentement. Çà et là, dans le réseau des canaux qui drainent ces prairies, on voyait des feux éclater, d’autres feux s’éteindre, et les silhouettes des arbres se dessiner, de plus en plus allongées, sur le sol. Au milieu de la Loire, un point noir, surmonté d’une trace fumeuse, glissait, et, derrière une flottille de bateau à l’ancre, Paimbœuf, réunissant en un seul foyer tous les rayons de ses vitres embrassées, flamboyait. Enfin, à l’extrémité de l’horizon, sur la droite, entre deux pointes qui forment, à l’entrée de l’Océan, comme une porte ouverte sur l’immensité, un des grands transatlantiques, sortant de Saint-Nazaire, détachait sa mâture élégante sur l’embrassement du ciel, et semblait nager dans une mer de feux.

À ces splendeurs s’ajoutait la grâce du paysage rural qui entourait immédiatement nos contemplateurs, et dont l’ensemble harmonieux emprunte sa physionomie à d’indescriptibles détails.

C’est le bois, la maison, l’arbre, le pâturage, pareils de noms, mais toujours particuliers et divers ; une fumée qui s’élève, un champ qui ondoie, le troupeau lent et rêveur, l’enfant qui jette aux échos ses cris, la charrette pesante, chargée d’herbes dont elle secoue les parfums dans l’air ; la femme qui passe, portant l’aliment des travailleurs ; le faucheur avec sa faux, pittoresquement dressé au-dessus de sa tête ; le mulet chargé de blé qui monte le coteau ; voix, mugissements, cris, chants, harmonies, haleines, formes, parfums, couleurs…