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« Bah ! se répondit-il à lui-même, en me levant je leur ferais peur. Si c’étaient deux amoureux, ou même deux amis, à la bonne heure ; mais à côté d’un enfant, nul auditeur n’est de trop. »

Et il se tint coi.

« Elle n’y est pas la vieille Jeanne ? dit la petite voix.

— Non, tu sais bien, répondit l’autre, dont l’harmonie, plus composée, n’en était que plus suave ; nous l’avons appelée ; mais elle n’a pas répondu. Elle reviendra sans doute, et dans quelques minutes nous la trouverons.

— Qu’est-ce que cette plante-là ? reprit la petite voix, changeant de sujet avec la mobilité particulière aux enfants.

— On ne peut encore le savoir ; car ce ne sont que des cotylédons et les premières feuilles n’ont pas encore apparu. Ces deux choses charnues sont les deux moitiés d’une petite graine que le vent sans doute a apportée là, car ce n’est pas un genêt.

— C’est donc le vent qui porte les graines ?

— Oui, le vent est le grand semeur ; c’est grâce à lui que les plantes, ces pauvres enracinées, voyagent pourtant d’un bout à l’autre du monde, sans autre limite que leur convenance, et avec faculté de rester partout où elles se trouvent bien.

— Et les enfants, c’est-il le vent aussi qui les apporte au sein de leur mère ?

Émile Keraudet, de son abri, ne put s’empêcher de sourire.

« Il n’y a donc pas un genêt, se dit-