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tion peut-être. Et, après huit années de lutte, ils étaient chassés de cette terre qu’ils avaient défendue pied à pied contre la Révolution et que tant de sang avait arrosée. Les deux seuls récits qu’on possède de leur exode sont singulièrement touchants : avant de se mettre en route, Guillemot se confessa et entreprit une dernière tournée de famille ; il voulut embrasser, à la Ville Helo, sa vieille mère, quasi centenaire ; passer par Kerdaniel pour dire adieu à son parrain ; revoir la maison où sa femme était morte ; prier au cimetière sur la tombe des siens. À Bléluhern il rejoignit les officiers de sa légion qui allaient partir avec lui et, le surlendemain, à Kerdef, l’attendaient ceux de la région d’Auray. Tous trouvèrent, le 2 mai, dans la nuit, à s’embarquer sur un navire qui faisait voile vers le Havre et qui, huit jours après, les déposa à Guernesey. Deux mois plus tard, le gouverneur de l’île se débarrassait d’eux en les expédiant à Jersey, où s’étaient déjà réfugiés nombre de proscrits des Côtes-du-Nord.

La menace d’une déportation en masse au Canada les tracassait fort : Georges, avec lequel ils correspondaient, les rassurait : « Le gouvernement anglais, écrivait-il, ne nous a pas accordé un lieu de refuge pour nous tendre un piège. » Du reste, il ne croyait pas la paix durable : « Nous nous reverrons bientôt, de quelque manière que les affaires tournent », ajoutait-il ; et il intercédait