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On se consulte. Les verrous sont enfin tirés : sept ou huit hommes, porteurs de fusils garnis de baïonnettes, bousculent les domestiques, pénètrent brusquement dans la cour et saisissent Antoine au collet, en disant : « N’est-ce pas là de B… ? » Il répond affirmativement. « Et Monsieur Laisné ? — Il n’est pas à la maison, il est à Sarzeau », réplique Antoine, indice qu’il se sait en danger et qu’il essaie de sauver son compagnon. Il est tête nue, demande qu’on lui laisse le temps de prendre son chapeau : « Tu n’en as pas besoin. » Les hommes l’entraînent dans l’avenue, mais quatre ou cinq d’entre eux reparaissent aussitôt : « Monsieur Laisné est ici, il faut qu’il vienne avec nous. » Laisné est là, en effet ; attiré par le bruit, il a traversé la cour en sabots, s’est approché du portail ; il est happé, poussé dehors. « Nous les menons parler à quelqu’un ici près. Bonsoir ! » La châtelaine, prise de peur, rentre au manoir et s’y enferme.

Quatre jours plus tard, avant de retourner à Pipriac, elle adressait au préfet du Morbihan un récit de l’événement ; aux détails qu’on vient de lire elle ajoutait cette remarque : aucun des hommes n’était costumé à la mode du canton de Sarzeau ; ils portaient tous des carmagnoles bleues, preuve qu’ils venaient de loin. Ils parlaient « très bon français ». — Une enquête fut ordonnée ; mollement conduite, elle n’aboutit