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traient avec leurs cousins, ceux-ci aux nombre de trois. Deux d’entre eux étaient meuniers au moulin de leur père, et le troisième était commis de l’Enregistrement, à la ville.

On fit les présentations.

Germaine et Célina se levèrent, échangèrent des poignées de main avec les arrivants ; et tout le monde se plaça autour de la table, sur des chaises en canne qu’il fallut aller prendre dans la chambre voisine. Izard sortait à tout bout de champ, rentrait avec des bouteilles sous le bras ; les garçons de leur côté s’occupaient de faire boire les femmes, et les bouchons claquaient coup sur coup, tirés des goulots avec fracas.

Les trois neveux rentraient du bal, ils s’étaient amusés. Ils racontaient que la fille du marchand Herbeaux était tombée au milieu d’un quadrille, entraînant son cavalier ; les autres danseurs avaient culbuté sur le couple échoué ; cela avait fait un large tassement très comique. Ils donnaient à entendre qu’il s’était alors passé des choses, et ils souriaient sans rien préciser. Le commis, au contraire, dédaignait ces vulgaires gaîtés. À la ville, on avait mieux que des dondons. Les filles, d’ailleurs, ne savaient pas valser au village. Et il affectait des airs blasés, en homme qui a pris sa part de plaisirs plus délicats.

Germaine écoutait, distraite. Une impatience la gagnait. Ces longues lampées sur place l’étourdissaient ; un feu rougissait ses pommettes.

Champigny donna le signal du départ.

— Y a de la jeunesse. Faut ben qu’elle s’amuse !

Et toute la bande alors se leva. Il ne resta à la maison que le vieux Izard, un peu souffrant d’un rhumatisme. Une animation régnait parmi les hommes. Ils avaient la voix haute et le regard hardi, avec douceur. Le commis arquait sa personne sur le côté pour parler à Germaine.