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l’embroussaillement des taillis. Des branches accrochaient sa robe, parfois. Elle avait un petit frisson de peur ; et tout à coup, haletante, la chair en sueur, elle le voyait apparaître.

C’était des bonheurs. Il lui disait qu’il l’attendait depuis des heures, sans oser bouger de place. Il ne lui faisait pas de reproches. Il était bien trop content de la voir. Et elle se sentait remuée dans ses entrailles d’être ainsi aimée.

Il la prenait dans ses bras, la portait, riant, bégayant, pris de folie. Toute robuste qu’elle était, elle pesait le poids d’une plume dans ses larges mains. Il avait un plaisir farouche à la tenir contre lui, longtemps.

— Si j’te lâchais plus ? lui disait-il.

Elle lui donnait des tapes sur la tête ou bien, le bras autour de son cou, posait sur sa nuque sa bouche chaude. Elle répondait :

— Ça va. Garde-moi pendue après toi !

Ses bras l’étreignaient alors à la briser. Il avait des élans d’amour féroce. Les baisers qu’il donnait étaient douloureux comme des morsures. Il ouvrait la bouche sur sa chair, les mâchoires secouées d’un tremblement. Et il lui répétait à satiété qu’il mourrait si jamais elle cessait de l’aimer ; on verrait sa carcasse quelque part sur le chemin ou bien pendue à un arbre. Et il se meurtrissait avec les ongles pour lui montrer combien peu il tenait à son corps.

Elle se jetait sur lui, retenait ses mains, le suppliant avec colère de croire à elle :

— Quand j’te dis que j’t’aimerai jusqu’en enfer !

Il la regardait, les yeux fixés sur sa bouche, toute sa face dilatée dans une clarté, et balbutiait :

— Dis-moi ça toujours, si c’est vrai.

Elle ne le lui disait jamais assez. Il mettait son visage