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Ma tante s’interrompit pour tousser.

« — Je ne saurai jamais continuer, Stéphane, me dit-elle, si vous ne me donnez un verre d’eau. »

« Je versai un verre d’eau et, après l’avoir sucré, elle y mit elle-même deux gouttes de fleur d’oranger.


VI


» — Il me sembla, continua ma tante après avoir bu à petites gorgées, il me sembla qu’elle allait tomber sur le plancher, si je la quittais. Et pourtant il fallait ouvrir. Je savais que c’était Lisbeth ; j’avais reconnu ses deux petits coups, car il n’y avait qu’elle pour sonner de cette manière. Je descendis enfin. Oui, c’était bien Lisbeth. Elle était très pâle. Elle me dit en entrant :

» — Eh bien ?

» Je lui répondis en levant le doigt :

» — Elle est en haut.

» Alors la voilà qui monte tout droit sans rien dire et moi derrière, assez sotte et ne sachant comment tout cela allait tourner. Lisbeth pousse la porte, fait un pas, puis s’arrête ; j’entre à mon tour, et voyant qu’elle s’arrête, je la pousse dans le dos. Non, je n’oublierai jamais cette scène, Stéphane. Clotilde immobile les yeux fixes, regardait Lisbeth en lui tendant à demi les bras, comme quelqu’un qui n’ose pas ; mais tout à coup Lisbeth ouvre les siens et Clotilde s’y abat de tout son corps. Et elle murmurait dans ses sanglots des mots :

» — Élisabeth ! Beth ! Beth ! Lisbeth ! Élisabeth !