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— Piet veut donc m’enlever ma chère Truitje, vieille mère ?

— Piet sera un bon fils pour vous, Nikker, comme il l’a toujours été pour nous.

— Et qu’est-ce que Lukas Snip donnera à son fils Piet pour entrer en ménage ? Voyons, mère, qu’est-ce qu’il lui donnera ?

La bonne vieille toussa alors dans le creux de sa main et dit :

— Vous savez bien, Nikker, que nous sommes de pauvres gens et que nous avons besoin de ce que nous avons ; mais Piet aura du bien après nous.

— Alors n’en parlons plus : je ne veux pas que Truitje soit malheureuse avec Piet.

— Nous donnerons à notre garçon le cochon et les poules.

— Non, mère, il lui faut une vache.

— Une vache, Nikker ? c’est bien cher. On n’en saurait pas avoir à moins de quatre cents francs. Qui est-ce qui payera une vache de quatre cents francs à Piet ?

— Anna Snip a mis bien des sous dans le vieux bas qui est sous sa paillasse.

— Jésus Dieu ! taisez-vous, Nikker. — Truitje aura sa vache.

— Et le pré, Anna Snip : il faut le pré avec la vache.

— Le pré, Nikker ? elle aura la vache, mais pas le pré.

— N’en parlons plus, mère ; Truitje n’aura ni la vache ni le pré et Piet n’aura pas Truitje.

— Vous voulez donc nous tirer notre dernier sou, Claes ? Nous avons un petit pré le long de la rue aux Vaches. Elle l’aura.