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— Truitje !

Mais qui ne se montra pas ? Ce fut Truitje, non plus que son bon ami Piet.

Ils se tenaient cachés sous l’escalier, parmi les balais, craignant de faire un mouvement et retenant leur haleine.

— L’état de cordonnier est un bon état, Claes, dit le vieux Snip ; oui, c’est un état qui donne à manger à la femme et aux enfants.

— C’est ce qui vous trompe, Snip ; c’est un rude état et qui rapporte peu. Votre état est plus facile que le nôtre et il y a toujours un bon magot dans la maison d’un tailleur.

— Nikker, il est plus difficile de mettre des pièces à un habit qui ne tient plus ensemble que de reclouer une semelle usée.

— Celui qui sait ressemeler une vieille paire de bottes rebâtira sa maison tombée en ruines, Snip.

— Je le défie bien de faire une couture dans du drap sans que les points ressemblent aux cordes avec lesquelles Mathias Job sonne à messe, Nikker.

— Snip ! Snip ! nous faisons ouvrage d’homme en clouant des semelles, mais vous faites ouvrage de femme en ravaudant des chiffons.

Lukas Snip, malgré sa douceur, entra tout à coup dans une si grande colère qu’il lui fut impossible de rien répondre, et Nikker se dit en lui-même :

— Le vieux singe est battu. Il a l’air d’avoir avalé son aiguille.

Et de son côté Lukas Snip pensait :

— Je ne donnerai pas notre garçon à Truitje Nikker sans conditions.

Puis il alluma sa pipe, but une tasse de café et s’en alla en disant :