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si leurs parents s’entendaient pour les marier, reprit le meunier. Qu’en pensez-vous, Gertrude Flamart ?

— Oui, Taubert, j’aurais dit cela, si Flamart ne s’était pas mis à boire au lieu de moudre son grain.

— Flamart a mal tourné, c’est vrai, Gertrude ; mais chacun a ses malheurs et il nous a aidés dans les nôtres. Taubert et sa femme n’oublient pas le bien qu’on leur fait, meunière, et ils préfèrent oublier le mal que le bien. Voilà pourquoi je vous dis, Gertrude, que si Monique a du goût pour notre garçon et si notre garçon a du goût pour votre fille, il nous faut les marier ensemble.

— Ah ! m’sieu et mâme Taubert, cœurs du bon Dieu, cria Gertrude Flamart en se levant toute droite, je ne vous ai pas assez estimés.

— Écoutez, Gertrude, et vous, femme, écoutez. Je dis ce que je dis. Eh bien, quand les enfants ont du goût l’un pour l’autre, il faut les marier le plus tôt possible. Ce sera un beau jour de Sainte-Catherine pour eux si nous leur mettons la main dans la main en leur disant : Aimez-vous, les enfants, et que sainte Catherine vous porte bonheur.

La bonne femme du meunier Flamart eut alors un sanglot derrière ses mains et dit à Taubert :

— Non, il n’y a pas d’homme comme vous, voisin !

Et Donat causait toujours tout bas avec Monique, car la chambre était grande et les garçons du moulin riaient aux éclats dans la cuisine, de façon qu’ils n’avaient rien entendu de ce que se disaient entre eux les vieux parents.

Mais Damien Taubert se lève en riant et va prendre Monique par la main.

— Monique, lui dit-il, voulez-vous de Donat Taubert pour votre mari ?