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lons noirs aussi, descendirent voir si le corbillard n’arrivait pas.

Toutes les femmes de la maison étaient sur le palier, leur livre d’heures à la main, attendant qu’on partit et curieuses de voir passer le cercueil.

Le corbillard arriva enfin, en retard d’un quart d’heure, noir avec sa grosse croix jaune, deux lanternes allumées, attelé d’un maigre cheval dans des harnais sales et conduit par un cocher en casquette. Un homme long, osseux, les cheveux ras, monta à la chambre, enleva la bière avec M. Lamy, et après l’avoir fait glisser sur les tringles de la voiture, ferma dessus les portières, bruyamment.

On se mit en route vers l’église, le corbillard en avant, Jean, tête nue, derrière, puis M. Muller, M. Lamy et quelques voisins ; et les femmes marchaient sur les trottoirs, bavardant entre elles.

À l’église il fallut attendre. On resta debout à la porte, devant le cercueil posé sur le brancard.

Puis un vicaire arriva, en surplis, son livre à la main, et le clerc se mit à côté de lui, tenant un vase de cuivre dans lequel trempait le goupillon. M. le vicaire lut les psaumes, aspergea d’eau bénite le corps, et tout de suite après, la morte fut remise dans le corbillard.

Au cimetière, M. Lamy regarda autour de lui : ils n’étaient plus que trois, Jean, M. Muller et lui, les pieds enfoncés dans la terre jaune ; et un ciel noir, très bas, les enveloppait.

Les cordes grincèrent, la caisse toucha lourdement le fond de la fosse et un peu de terre s’éboula. Alors Jean s’affaissa sur lui-même, sans connaissance.

Une heure après il était couché dans le lit de M. Muller. On l’avait transporté dans un fiacre qui