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On tira de l’écurie le roussin et le grison et on les mit à une pesante carcasse, montée sur quatre roues qui faisaient en roulant un bruit de vaisselles entrechoquées.

Puis le fouet pétarda : nous descendîmes, au trot des chevaux, les fers claquant, la grande rue de Neufchâteau qui débouche dans les champs.

Nous allions à Bouillon.

Au premier tournant de la route, près d’une grosse ferme où des soldats jouaient au bouchon, une sentinelle croisa le fusil et cria :

— Qui vive ?

C’étaient les postes belges. Ils étaient échelonnés de distance en distance, quatre hommes et un caporal, et se repliaient, à mesure qu’on les relevait, sur leurs campements, dans les villages et dans les champs.

On répondait :

— Belgique.

Le caporal montait sur le marche-pied, mettait la tête dans la voiture, regardait s’il n’y avait pas de contrebande de guerre, disait : c’est bon, et les bidets repartaient, pendant que la sentinelle se replaçait au port d’armes.