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chable, aussi n’en compte-t-on pas des myriades ; elles tiendraient toutes dans la bibliothèque d’un bachelier ; au diable toutefois la correction ! & comment s’exprimer selon les règles ? Elle offre, votre ou plutôt notre satanée langue, car c’est la mienne aussi, des difficultés presqu’insurmontables. On a beau les repousser, une masse de mots ternes & neutres entravent à tout instant votre essor, & quand, après avoir griffonné quelque peu, l’on s’épluche, on est tout étonné de n’avoir à son service que des verbes abstraits d’une accablante banalité, tels que ceux-ci : faire, dire, aller, répondre, voir, devoir, pouvoir, savoir, falloir, etc. Vous affirmez, vous, le dompteur passionné des plus rebelles vocables qu’avec beaucoup de patience & de volonté l’on aboutit à se passer de ces vulgaires auxiliaires, oui, mais à quel prix ? Un de mes anciens condisciples de collège, entre tous adroit & têtu, faillit, à ce jeu, devenir fou ; j’en fréquente un autre, naguère très robuste, que semblable