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l’hallali

mation fut délivré. Les gendarmes enlevèrent les hardes ensanglantées pour servir de pièces à conviction et la Guilleminette put faire la toilette de son mort. Elle le lava, lui passa une chemise fraîche, l’enveloppa du suaire, s’interrompant parfois pour presser sur les paupières qui ne voulaient pas se fermer.

Le menuisier et son ouvrier arrivèrent le soir avec la bière. Jean-Norbert, pour honorer la race, s’était départi de sa ladrerie habituelle et avait commandé un cercueil en vieux chêne, boulonné d’acier. Il regarda tranquillement les deux hommes prendre le Vieux par la nuque et les talons et le coucher parmi les copeaux : jamais M. de Quevauquant n’avait paru aussi terrible que dans son drap blanc, la mâchoire retenue par une mentonnière sous son nez en faucille et regardant droit devant lui, par delà les temps. Toute grimace ayant disparu, il eut la beauté des portraits de la lignée.

M. Custenoble, le lendemain matin, vint faire la levée avec le sacristain et les deux enfants de chœur en robe rouge trop longue où se prenaient leurs pieds. L’énorme Gédéon avait prêté une charrette basse et sa meilleure paire de chevaux. Un grand drap de lit recouvrait le cercueil. Le temps s’étant mis au dégel, on piétinait dans des terres molles. Jean-Norbert, re-