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les arbres et les bêtes. Elle filait le matin, emportant sa miche qu’elle mangeait avec du cresson et le soir ne rentrait à la maison que pour se couler au lit.

Jean-Norbert, ensemble avec le vieux valet, ayant en deux ouvrées fauché la ségalaie, une terre qu’il avait dû louer à un fermier du village, lequel autrefois, l’avait payée au baron Gaspar le prix d’un morceau de pain, il lui avait bien fallu prendre sa part de la peine. Elle avait aidé l’Ensevelisseuse à botteler les moyettes, à les porter au char et finalement à les engranger. Mais, après, elle n’avait plus été bonne qu’à mener la vache du côté des marais, les oies au verger et les porcs à la glandée, quand le petit porcher était occupé d’autre chose, mideronnant à l’ombre, sifflant dans des flûtes de roseaux et quelquefois se battant avec les petits vachers qui arrivaient la défier.

Cependant le hérisson rouvrait l’œil et ne voyant plus cette fille aux longues jambes, qui doucement le taquinait, encore une fois il tirait ses pattes de dessous son ventre. Elle s’était couchée sur un tronc d’arbre, le dos à plat dans l’écorce tiède, tenant sa nuque entre ses mains croisées, et regardait, par les trous des feuilles, bleuir le ciel. Une palpitation égale, tranquille, lui levait les seins sous son loqueton de corsage. Toute