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l’hallali


XVI


Un vent doux souffla des marais avec une odeur musquée. Jaja, une fois, rentra et dit en riant :

— Les arbres font aller leurs petites mains.

Et ce fut le printemps. Au verger, les pommiers s’épinglèrent de bouquets comme des cœurs roses. Dans le bois des chênes, pépiaient les couvées. Il flotta des plumes et du pollen sur la grande noue solitaire. Des jours entiers maintenant, la fillette demeurait dehors, poussant devant elle la maigre bête à Guilleminette ou bien assise parmi les roseaux, à mi-jambes dans le marais. Une lourde palpitation grasse soulevait la masse liquide, toute dense de la mucosité des lentilles, gonflée de bulles d’air montées du fond et qui crevaient à la surface. Quelquefois une succion douce lui mordait le mollet ; elle relevait la jambe et d’une pichenette faisait retomber une sangsue.

Cette vie secrète des dessous aquatiques l’a-