Page:Lemonnier - L'Hallali, sd.pdf/192

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mariée, voyait assez de monde. On espéra du hasard un établissement profitable dont les avantages se fussent reportés sur les parents. Dans la société où elle fréquenta, Sybille apparut le type impérieux et noir des Quevauquant. Elle conquit sans charmer ; sa réserve un peu farouche ne fléchit que pour Léonce avec qui elle avait joué, enfant, et dont la gaminerie gentille et taquine déjà alors faisait des ravages dans le cœur des petites filles.

Il ne devait apporter à cette passionnette qu’un entraînement sans profondeur, mais Sybille, sèche et ardente, s’enflamma. Comme sa tante la laissait assez libre, ils se voyaient à l’église ou près des remparts, comme de petits amants.

La nouvelle s’ébruita. Emmeline la jugea compromise et demanda à sa sœur Adélaïde qu’on les mariât, aussitôt les études de Léonce terminées. Mais Mme de Gransard, qui n’eût point montré de répugnance pour une jeune fille riche, estima celle-ci trop pauvre et en pensée adjugea son fils à quelque héritière. D’ailleurs, une rivalité de famille existait entre les Lanquesaing et les Quevauquant, à la longue, dégénérée en dédain pour ces terriens appauvris jusqu’à la famine. On coupa court à une illusion dangereuse en renvoyant Sybille à Pont-à-Leu. Ce fut là son seul amour et il lui troua le cœur. Elle avait