Page:Lemonnier - L'Hallali, sd.pdf/188

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tire. Elle détacha les bras de Barbe et, la bouche pincée :

— Ma sœur, ces sentiments vous font honneur, mais modérez-vous. Il ne convient pas de se donner en spectacle.

Barbe se tamponnait les yeux, et Sybille, avançant le front, pouvait enfin recevoir, d’un effleurement léger, le baiser auquel elle avait droit, une fois l’an.

Leur vie, comme les autres fois, s’arrangea dès le premier moment. La Cadie les mena à leur chambre, une pièce à deux lits sur la rue, spacieuse, d’un goût banal et froid, où les fauteuils, comme des collerettes, portaient au dossier la frange lourde de broderies au crochet signalant l’application manuelle du pensionnat. Barbe y put dormir, sous la couette de plumes, des sommeils dont rien n’eût égalé la douceur si elle n’avait été obligée, chaque matin, selon la coutume de la maison, d’aller entendre la messe de sept heures. On déjeunait ensuite de café, de beurrées et d’un peu de miel. Au repas de midi, du laitage, des œufs, des pâtisseries légères.

Mme Adélaïde s’abandonnait au goût des douceurs, sans se départir de ses habitudes d’économie. L’après-midi, on sortait par la ville, visites, promenades sur le mail, stations devant les magasins. Ensuite, on rentrait ; on ne ressortait