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les hommes, une femme n’arrive à rien. Et elle lui promit sa pratique abondamment.

Puis Clarinette, excitée par la liqueur, se mit à bavarder. Ils auraient des logeurs ; avec un peu de chance, leur café deviendrait petit à petit un hôtel ; et, cyniquement elle émit cette théorie que les vieux étaient de meilleurs clients que les jeunes. De tout le reste, de ses rancunes contre sa mère, des recommandations de la vieille Zébédé au sujet de la restitution des objets détournés, elle ne se souvenait plus, étourdie par le bruit de ses paroles, dans un commencement d’ivresse. Quand elle s’en alla vers le tomber du soir, avec la grosse signature presque illisible de la Félicité au bas de l’imprimé que lui avait remis le secrétaire, elle manqua choir dans le puisard aux fumiers, la tête et les jambes vacillantes. C’est égal, elle s’était joliment amusée, et maintenant que la paix était faite, elle comptait bien revoir sa mère de temps en temps.



VII



Le mariage à l’église se fit un mercredi matin à sept heures. La veille au soir, après la fermeture des grilles, on était allé à la mairie, avec les témoins : du côté de Huriaux, Simonard et Capitte ; du côté de Clarinette, le Crompire et Zidore Piéfert, le marteleur. Les femmes accompagnaient leurs hommes. Toute cette bande, les hommes débarbouillés à la hâte, les femmes ficelées dans une toilette de circonstance, avait envahi la salle des mariages, une ancienne grange proprement badigeonnée au lait de chaux, avec une grande table pour le maire et son greffier, et, le long de la table, des bancs et des chaises pour les futurs et les gens de la noce.

Puis le magistrat, un blatier drouillard en vieille redingote grise, poudrée de farine, l’écharpe tricolore à la ceinture, était entré, leur avait lu les articles du Code civil en sautant des mots ; et ils avaient tous signé ensuite, quelques-uns de leur nom,