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fermiers cossus, quatre hobereaux en villégiature, quelques messieurs fervents venus des autres villages, marchaient dans leur sillon, plus près de Notre Seigneur que les manants.

Chaque année, en mai, le dimanche après les Rogations, la coutume était de pèleriner ainsi jusqu’à une grotte célèbre dans le pays ; un ancien financier, comte romain, l’avait édifiée dans son parc, à la croisière de quatre allées de hêtres, en glorification de Notre-Dame de Lourdes ; et un premier miracle, avorté, donnait l’espoir d’une suite de miracles définitifs. Malheureusement la contrée était sans foi : aux dernières élections, l’ivraie libérale avait étouffé le bon grain catholique ; peut-être une secrète rancune de la Vierge reculerait pendant quelque temps encore la manifestation des desseins célestes. Le matin même, au prône de la grand’messe, Bourdaille avait développé ce thème dans son homélie.

Cependant la procession avait gagné la grande rue. Deux semaines durant, chaque