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rire dans le babil de la source ? » Elle s’étonna, son sourcil ondulait avec candeur. « J’ignore ce que tu veux dire, fit-elle. Et cependant ce que tu me dis est pour moi comme un fruit sucré. Quand tu es venu, mon sein s’est levé, je ne sais pas autre chose. » Oh ! cela ! cela ! Janille ! Ton petit sein aux pointes froides droit dans ton corsage comme le jeune bourgeon d’avril !

Un frais silence nous baignait et il n’y avait pas de vent, il n’y avait là que le vent léger de nos souffles l’un près de l’autre. Je croyais entendre tourner au fond de sa vie une meule écarlate. Je lui dis : « Tu m’es venue comme une petite chose enfant qui serait née de mon désir. Je t’ai appelée du fond de moi et tu es venue. » Elle prit les soies de ma barbe et les annela autour de ses doigts. « Toi, fit-elle, tu étais grand et fort comme les chênes. Je ne savais pas comment tu aurais fait un jour pour m’embrasser. » Des paroles limpides nous coulaient des lèvres. Il montait du profond de nous comme le bruissement léger de la terre après la pluie. Et maintenant encore